Avez-vous déjà entendu quelqu’un dire: « le cerveau ne fait pas la différence entre la fiction et la réalité : la preuve quand on regarde un film on a peur, on pleure ou on rit…cela prouve bien que le cerveau croit ce qu’il voit même quand c’est de la fiction »
Les raccourcis
Alors oui et non. Mais ceci illustre très bien, une autre composante du cerveau : l’apprentissage.
Quand quelqu’un apprend une nouvelle matière ou se retrouve dans un nouveau domaine, il ne connaît pas encore assez bien cette matière pour voir clairement les détails, les infimes différences que comporte la matière à étudier. Et c’est normal, c’est le processus d’apprentissage.
En fait le cerveau va simplifier ce qu’il apprend de manière à l’ingérer, un peu comme nous humains, quand nous mangeons, nous mâchons pour avaler et ainsi permettre à l’intestin de digérer plus facilement.
Il en va de même pour le cerveau. Il crée des raccourcis. L’apprentissage des enfants se fait de la même manière. Lorsque vous expliquer quelque chose à un enfant vous simplifiez et faites des raccourcis. Le raccourci le plus important que le cerveau humain fait, c’est de voir les choses de manière manichéenne. (0/1, oui/non, blanc/noir, bon/mauvais, avec nous/contre nous).
Ne nous laissons pas emporter par cette vision. Ayons conscience de cela et le monde ira mieux.
Pour en revenir à la fiction vs réalité, il faut comprendre et ingérer le principe des trois cerveaux :
Les trois cerveaux
Le cerveau est comme un ordinateur. Il enregistre et classe toutes nos expériences depuis que nous existons. Comme le fait-il et d’après quels critères ?
Nous autres êtres humains, disposons, d’après ce que la neuroscience a découvert jusqu’à présent, de trois cerveaux :
- le cerveau reptilien
- le cerveau limbique
- le néocortex
Cerveau reptilien
Il régule les fonctions vitales comme la respiration ou le métabolisme. Il ne pense pas ou n'apprend pas : il exécute.
Cerveau limbique ou amygdale
Il gère les émotions et réactions pysiologiques.
Néocortex
Il gère le raisonnement et permet de survivre à l'adversité
Ces trois différentes couches sont apparues au fil de l’évolution, depuis nos ancêtres les petits mammifères qui existaient déjà à l’époque des dinosaures, jusqu’au développement des primates en Homo sapiens.
Le blog de Dose MindCare l’explique très bien :
« Le cerveau reptilien est le cerveau de l’instinct de survie et de conservation, et il est apparu il y a 400 à 600 millions d’années. Il est le centre de nos fonctions primaires et fondamentales : contrôle moteur, respiration, alimentation, fréquence cardiaque, température corporelle, mais aussi attention, peur, combat…
Ensuite le cerveau limbique, apparu il y a 60 millions d’années, à l’arrivée des premiers mammifères. Ce cerveau est le centre des émotions, de la décision, de la mémoire à long terme et de la motivation, du plaisir / déplaisir, des réussites / échecs…
Faîtes vivre à différentes personnes le même événement et leur réaction sera différente : c’est le résultat de l’apprentissage du cerveau limbique.
Le néocortex est uniquement présent chez l’homme et chez une partie des mammifères comme les chimpanzés, les dauphins… C’est le cerveau de la raison, de la logique, de la parole et de notre conscience.
Ce cerveau est donc celui de notre capacité à faire face à des problèmes et à les résoudre : rationalité, curiosité, créativité… »
Ce qu’il faut bien comprendre c’est que la mission principale des deux premiers est de maintenir leurs hôtes en vie. C’est le rôle binaire mais primordial du cerveau reptilien, qui va se développer avec les émotions, notamment la peur, du cerveau limbique. Quant au néocortex, il est là pour réfléchir. Il contrebalance les deux autres.
Par exemple, lorsque nous regardons un film, nous avons des émotions (peur, joie, excitation, tristesse…). Si nous voyons le « gentil » se faire tirer dessus, si le néocortex n’était pas là, nous nous cacherions sous le canapé ou appellerions la police, mais il est là pour nous calmer et dire aux deux autres cerveaux : « calmez-vous les copains, ce n’est que de la fiction ».
Le rôle des deux premiers cerveaux est de nous maintenir en vie, donc d’une certaine manière, ils ne font pas « dans le finesse » et au moindre signe de danger, ils tirent la sonnette d’alarme, mais le néocortex est là pour les calmer.
Le rôle "des cerveaux" en situation de danger
Lorsque nous sommes confrontés à une situation que notre système nerveux centrale juge « dangereuse », nous allons agir en fonction du temps qui nous est imparti. Si la situation exige une réponse immédiate, de l’ordre de l’instantané, c’est le rôle du cerveau reptilien.
C’est de l’ordre du réflexe, on ne pense pas à ce que l’on fait.
Par exemple : quelque chose de chaud => on retire sa main.
Parfois même on se surprend à réagir avant même d’avoir compris ce qui se passait, presque comme un automate. Cela est très intéressant car on se rend compte que le cerveau a « vu » et « enregistre » des données à travers nos cinq sens, que notre côté « conscient » n’a pas « vu », et donc le corps a réagi. Il faut savoir que c’est bien du cerveau que vient « l’impulsion ». Plus loin, nous parlerons plus en détails du cerveau et l’expérience.
C’est seulement après que monte l’émotion. En général c’est la peur qui monte ensuite car dans ce genre de situation, il s’agit souvent d’éviter une catastrophe, et le cerveau reptilien enclenche la mode urgence pour se sortir d’une situation dangereuse.
Ensuite si la situation nous permet d’avoir quelques fractions de seconde pour « évaluer » alors les émotions rentrent en jeux.
Pour exemple si vous voyez un lion qui vous saute dessus, votre corps va faire un bon de côté, sans que vous ayez réfléchit, il s’agit là du réflexe déclenché par cerveau reptilien.
En revanche, si vous voyez le lion à une dizaine de mettre de vous, ses quatre pattes sur le sol, mais qui vous regarde avec des grands yeux, et que vous lisez « miam » dans son regard, alors à ce moment, l’hippocampe va détourner une partie de l’information vers le cerveau limbique, à défaut du néocortex, et va enclencher les émotions appropriées (pour plus de détails voir le livre de Daniel Goleman – L’Intelligence Emotionnelle – Tome 1 – Edition J’ai lu – page 39).
En cas de stress, nous réagissons d’une des trois façons suivantes :
Freeze
S’immobiliser
Flight
S’enfuir
Fight
Se battre
Votre réaction va aussi dépendre de la réaction du lion, plus celui-ci vous laissera de temps plus vous en aurez vous-même pour « évaluer » la situation et pour « penser ».
Dans ce cas, le rôle des émotions est de vous permettre de bouger. (emovere en latin).
Si le lion ne vous laisse pas de temps et commence à courir vers vous, l’amygdale va envoyer des hormones (via des peptides – dépendant de l’émotion en question), vers différentes parties du corps pour vous permettre de répondre le mieux possible à la menace. En d’autres termes, vous allez vous mettre à courir pour vous mettre à l’abri.
Mais si le lion ne bouge pas, le flux d’information va arriver au néocortex, les trois cerveaux vont fonctionner un peu plus ensemble et une forme de « réflexion » va vous permettre d’obtenir un panel de réponses plus important face à cette situation. Celle que vous choisirez dépendra de vos connaissances mais surtout de votre expérience.
Le cerveau et l'expérience
Nous l’avons dit tout à l’heure, le but principal du cerveau est de nous maintenir en vie.
Les critères de survie retenus par le cerveau reptilien et limbique ne sont pas vraiment objectifs car il sont basés en partie sur notre expérience de vie mais aussi sur « l’évolution », or ce qui était dangereux pour nous il y a 10 millions d’années ou lorsque nous avions deux ans ne l’est plus forcément alors que le contexte et l’environnement ont changé.
On parle alors de neuroception, c’est à dire la détection d’indices de sécurité ou de danger qu’exerce notre système nerveux autonome.
En fait la neuroception va analyser sans arrêt les informations venues de nos cinq sens pour savoir si nous sommes en sécurité. Elle va ensuite comparer la situation à l’instant « T » aux expériences passées afin d’adopter un comportement approprié.
99 % du temps, comme nous sommes toujours en vie, il n’y a pas d’alerte car le système nerveux se dit : « ok cette situation est similaire à celles vécues à tel âge » etc….et comme, « nous » sommes toujours en vie, « nous » avons pris la bonne décision en agissant de la sorte, donc faisons la même chose, choisissons la même tactique.
C’est pour cela que le cerveau reptilien n’aime pas le changement et que nous nous complaisons parfois dans des situations qui ne sont pas agréables pour nous, juste parce que c’est ce que nous connaissons et donc sans danger pour le cerveau reptilien. C’est le principe de la zone de confort.
Du coup nous adoptons le même comportement, à quelques détails près dans la mesure ou les deux parties du cerveau nous donne le feu vert en termes de sécurité.
On peut aussi comparer cette sécurité à une forme de « check list ». La première case serait la sécurité physique, la deuxième la sécurité émotionnelle, etc…
Tout ceci est en fait un scan gigantesque de toutes les données rassemblées au cours de notre vie. C’est à cela que sert la mémoire : une évaluation constante du niveau de sécurité. Il y a un signal d’alarme quand nous affrontons une situation nouvelle, ou lorsque les facteurs risques sont très hauts.
Pour notre cerveau, tant que nous sommes en vie, toutes les expériences sont réussies. Il va les classer suivant pleins de critères différents, que lui seul va « comprendre ». Un peu comme quand votre ordinateur classe des documents ou fichiers dans le dossier System.
Il ne faut pas manipuler le dossier système sous peine d’être incapable de redémarrer notre ordinateur correctement, nous devrons alors formater le disque dur et le réinstaller, chez l’homme on peut traduire cela par la folie.
Dans quel but ? Lors de la prochaine situation/expérience, le cerveau va analyser ce que vous êtes en train de vivre et il va rechercher la dernière fois que vous avez vécu une situation similaire pour reprendre le même comportement, car pour lui, ce qui a marché la dernière fois peut être une source d’inspiration pour ce qui se passe maintenant : une sorte de copier/coller. Si les situations sont différentes, il va s’adapter et improviser.
Cela induit le sentiment «d’ intuition ». Je vais malheureusement en décevoir certains, mais l’intuition n’est pas une sorte de pouvoir surhumain que certaines personnes possèdent. On le sait aujourd’hui et cela se vérifie de plus en plus, l’intuition est la somme des expériences passées.
Donc plus nous accumulons de l’expérience dans notre vie, plus notre cerveau sera à même de prendre les meilleures décisions basées sur les réflexes.
Le « mauvais » côté de cela est que :
- Le cerveau agit en fonction de schémas (pattern). Inconsciemment, comme nous l’avons vu, le cerveau va répliquer ce qu’il a fait dans le passé. Pour une situation d’urgence, cela peut être bénéfique, puisque vous êtes toujours en vie, mais le cerveau fait aussi cela pour TOUTES les situations par lesquelles vous passez. Décisions professionnelles ou sentimentales, le cerveau, via la mémoire, se base sur ce que vous avez fait la dernière fois. C’est pour cela que souvent nous avons des comportements qui ne nous plaisent pas mais dont nous avons du mal à nous défaire.
Cela dit, l’intensité des émotions ressenties à un moment donné, va rajouter plus de « poids » dans l’impact qu’aura une expérience pour le cerveau. (Théorie des marqueurs somatiques – Antonio Damasio)
- Toujours dans l’optique de nous garder en vie, le cerveau a une fâcheuse tendance à voir les situations sous un angle négatif, voir pessimiste, car pour lui il ne sera pas surpris et aura une « longueur d’avance » si les choses tournent mal.
Que faire maintenant une fois que vous savez cela ?
Le savoir est la première étape. En effet, toujours inconsciemment, vous allez pouvoir petit à petit essayer de corriger certaines habitudes ou même certaines émotions que vous ressentez lors de certaines situations mais qui vous déplaisent, pour exemple le trac quand vous devez parler devant une assemblée.
En fait, comme tous les divers domaines d’apprentissage, plus vous allez y penser, y réfléchir et mettre en relation ce que vous savez sur votre propre histoire personnelle, plus il y a de chance que vous serez en mesure de corriger ces petits troubles de la vie.
Ne vous blâmez pas !
Cela pourra faire l’objet d’un autre article mais, il y a beaucoup à dire sur la culpabilité. Cessez de vous culpabiliser. Dans cet article, nous avons vu que le cerveau agissait comme cela dans le but de vous sauver la vie….remerciez le ! Même si ce n’est plus tellement aussi urgent aujourd’hui que cela l’était pour nos ancêtres chasseurs cueilleurs.
Si vous comprenez cela et que vous l’intégrez dans votre personnalité, alors, vous vivrez en harmonie avec votre cerveau et l’accepterez aussi bien pour les bienfaits qu’il vous apporte (votre type d’intelligence…quelle intelligence êtes-vous ? D’après le Dr Gardner, il y a huit formes d’intelligence…autre article) que pour ces petites habitudes néfastes qu’il vous pousse à faire.